Romain, cadre dans une coopérative, gagne très bien sa vie, merci
Impliqué et bien payé dans sa coopérative, Romain s’étonne des préjugés autour des entreprises de l’économie sociale et solidaire
Un article du média d’information : Rue 89
Quand il décrit comment on lui parle de son boulot et de son entreprise, Romain ressort cette remarque :
« Vous, dans les Scop, vous êtes des idéalistes sous-payés. »
Cette phrase, lâchée par un confrère sur un salon, l’a un peu énervé. Il l’a beaucoup répétée pendant notre rencontre.
Et pour cause, Romain est un heureux salarié d’une Scop qui en compte une centaine – une société dans laquelle les employés ont un pouvoir de décision et détiennent la majorité du capital –, qui gagne très bien sa vie et ne se sent pas vraiment idéaliste.
« Chaque salarié a une voix »
A 28 ans, après quatre ans dans son entreprise, il a pu acheter un appartement dans Paris et reconnaît en toute décontraction :
« Je n’ai pas besoin de regarder souvent mes comptes. »
On sent qu’il s’est beaucoup renseigné sur le secteur des Scop et leur gestion. Il nous décrit avec aisance et simplicité les rouages de sa boîte :
« C’est une forme de démocratie appliquée à l’entreprise. Ça ne veut pas dire que c’est n’importe quoi, que tout le monde donne tout le temps son avis, au contraire.
Il y a un comité d’administration, un patron, mais ils sont élus tous les quatre ans. On organise parfois des référendums aussi, sur des questions spécifiques. Chaque salarié a une voix. »
« Il y a aussi des Scop qui vont bien »
Il nous livre le secret de son haut revenu : les bénéfices sont partagés entre les salariés :
« Quand l’entreprise marche bien, comme en ce moment, on touche une grosse prime à la fin de l’année. Les gens ont parfois une prime de treizième mois, moi, je touche quasiment une deuxième année de salaire.
Ça motive, forcément, tout le monde a intérêt à satisfaire le client rapidement. Il y a des techniciens qui reviennent le lundi en me disant “j’ai eu une idée ce week-end pour améliorer telle ou telle chose”. Quand je raconte ça, on me dit souvent : “Oui, mais vous vous n’êtes pas une entreprise normale.”
Mais c’est quoi une entreprise normale ? On cherche la performance économique, on a intérêt à avoir un gros carnet de commandes, comme tout le monde. C’est juste qu’en général, les gens pensent aux Scop pour sauver les entreprises qui ont des gros problèmes. Mais il y a aussi des Scop qui vont bien, avec des salariés qui gagnent mieux leur vie qu’ailleurs. »
« On peut aussi partager des bénéfices »
Il sait qu’il pourrait devenir associé d’une entreprise non coopérative et gagner encore plus en fin de carrière, mais il n’en a pas envie :
« Ma profession est par nature très libérale. J’ai fait un premier stage dans une entreprise où il n’y avait aucun partage des profits, les associés recevaient tout. Ça ne m’a pas plu du tout.
Je ne dis pas que toutes les entreprises peuvent passer en Scop et je sais bien que si la mienne va moins bien, on perdra tout un tas d’avantages. Mais j’ai envie d’expliquer que l’économie sociale et solidaire et les coopératives, ce n’est pas que pour les idéalistes qui partagent les soucis, on peut aussi partager des bénéfices. »
Revenus : 5 630 euros par mois
Salaire : 2 800 euros net par mois
Prime : 200 euros par mois de prime de travail de nuit ;
Intéressement et participation : 2 300 euros en moyenne par mois
Romain perçoit entre 25 000 et 30 000 euros de primes en fin d’année, répartis à un tiers sous forme d’intéressement versé chaque année, et aux deux tiers en participation bloquée pendant cinq ans. Soit l’équivalent de 2 300 euros en moyenne par mois, à raison de 760 euros en intéressement et 1 540 euros en participation.
« Je gagne bien ma vie, surtout grâce aux primes. »
Dividendes sur le capital : 1 500 euros par an, soit 125 euros par mois
Plan d’épargne entreprise (PEE) : l’entreprise abonde son compte à hauteur de 1 000 euros par an, soit 83 euros par mois
Chèque-cadeau : 500 euros à Noël, soit environ 41,5 euros par mois
Avantages : 80 euros par mois (dont 45 euros pour la part de l’employeur de la mutuelle, et 35 euros pour les transports).
Romain dispose aussi de la carte d’entreprise pour rouler en Autolib.
Dépenses fixes : 2 305 euros par mois
EDF : 20 euros par mois
Mutuelle : 45 euros par mois
Eau, gaz, copropriété : 110 euros par mois
Taxe d’habitation et taxe foncière : 75 euros par mois
Romain est récemment devenu propriétaire d’un appartement intra muros de 35m2, dans lequel il vit seul.
Impôt sur le revenu : 400 euros par mois
« J’ai pris des parts de mon entreprise, ce qui est défiscalisable à 18% puisque c’est une entreprise coopérative. »
Assurances : 40 euros par mois
Téléphonie (fixe et portable), Internet : 65 euros par mois
Frais bancaires : 15 euros par mois
Transports : 35 euros par mois
Crédits : 1 500 euros par mois
Romain paie 1 300 euros pour le remboursement de son emprunt immobilier, et 200 euros pour la prise de capital de son entreprise (pour 12 000 euros de parts).
Dépenses aléatoires : 940 euros par mois
Sorties, restaurants : 150 euros par mois
Courses et alimentation : 200 euros par mois
Frais liés aux déjeuners : 0 euro
« Quand je fais des déjeuners, je fais des notes de frais. »
Abonnement à la salle de sport : 40 euros par mois
Equipement : 30 euros par mois
« Je suis assez geek, j’ai une grande télé, un robot qui fait le ménage. J’ai acheté un hélicoptère avec caméra intégrée, je ne l’ai presque jamais utilisé. C’est inutile donc indispensable ! »
Alcool : 20 euros par mois
« J’ai une passion pour le vin, j’ai déjà 180 bouteilles. J’en achète souvent et je bois lentement. »
Voyages, vacances : environ 400 euros par mois
« Je fais souvent deux gros trucs par an, ça me coûte je pense 5 000 euros par an. »
Cadeaux et dons aux parents : 100 euros par mois
« Je donne des coups de pouce à mes parents pour leurs voyages ou leurs projets.
Je leur serai toujours redevable, ils ont dépensé beaucoup pour mes études à Paris dans une école privée. »
Épargne : 2 385 euros par mois
L’intégralité de ses primes de fin d’année (intéressement et participation) file direct en épargne salariale. Romain explique :
« L’épargne salariale est bloquée pendant un certain temps (au moins 5 ans généralement, ndlr), c’est un très bon système, sans ça on épargnerait moins.
Moi, je suis content, ça me fait une petite cagnotte à laquelle je ne touche pas.
Par contre, je n’épargne rien en dehors de mon épargne salariale. »
Source : Rue 89
