Les collectivités, l’ESS et la loi Notre
Pour beaucoup d’élus territoriaux, il est entendu que la loi Notre du 7 août 2015 empêche les communes et les conseils départementaux de soutenir les entreprises de l’ESS. Qu’en est-il réellement ?
Nous reproduisons ci-dessous l’article publié le 31/08/18 par le site LA LETTRE DU CADRE TERRITORIAL
L’ESS a « un pied dans l’économie et un pied dans le social ». Cette plasticité permet aux collectivités, en particulier les départements, de continuer à mener ou soutenir des actions économiques efficaces : une vraie opportunité à explorer.
La cause semblait entendue : avec la loi Notre et la fin de la clause générale de compétence, les aides aux entreprises allaient devenir quasiment impossibles pour certains échelons de collectivités. C’était sans compter une catégorie d’entreprises : celles relevant de l’économie sociale et solidaire.
Le département peut continuer à faire du développement économique
Dans la mesure où le but des entreprises de l’ESS est la recherche de l’utilité sociale et l’exercice d’une certaine forme de solidarité, souvent circonscrite à l’échelle d’un territoire, leur action est intéressante, et même parfois nécessaire à l’exercice des compétences propres de certains niveaux de collectivités. C’est probablement le département (collectivité des « solidarités territoriales ») qui est le plus concerné par cet impensé du nouvel édifice des compétences locales. Officiellement, il ne peut plus faire de développement économique. Pour autant, il a intérêt à trouver à ses côtés des entreprises d’insertion, des associations d’aide à domicile (dans le milieu rural par exemple) ou encore des structures d’accueil des mineurs. C’est donc naturellement qu’il peut être amené à les soutenir dans leurs projets de mise en place d’activités nouvelles ou d’évolution de secteur d’implantation. Pour l’instant, le contrôle de légalité semble s’être fait silencieux.
« Du moment que peut s’argumenter un lien avec la notion indéfinie de « solidarité territoriale », une brèche peut s’ouvrir »
Cependant, rien ne semble interdire d’être plus audacieux : pourquoi pas prendre des parts sociales au capital d’une société coopérative d’intérêt collectif dédiée à l’aménagement d’un site en renouvellement, ou alors aider une association de filières de producteurs locaux ? Du moment que peut s’argumenter un lien avec une compétence départementale ou avec la notion indéfinie de « solidarité territoriale », une brèche peut s’ouvrir. La plasticité de l’économie sociale et solidaire et le fait qu’elle ait « un pied dans l’économie et un pied dans le social » est donc source d’opportunités à explorer, de capacités d’action à revisiter. En Gironde par exemple, le conseil départemental soutient la SCIC Coactions, coopérative d’activité et d’emploi dédiée à la création d’entreprises en milieu rural. En Île-et-Vilaine, le département s’implique dans la revitalisation commerciale des centres-bourgs par l’intermédiaire du soutien à des entreprises sous forme associative ou coopérative.
TÉMOIGNAGE : Cécile Hébrard, directrice de projet Économie sociale et solidaire au département de la Gironde
« Nous participons à la structuration d’un écosystème en faveur de l’ESS »
La loi Notre a conforté le département dans son rôle d’acteur des solidarités humaines et territoriales. Tout en intégrant les évolutions portées par cette loi, le département a poursuivi son engagement actif en faveur de l’ESS. Ainsi, nous pouvons attribuer des aides à une structure dès lors que l’objet principal du projet se rattache à l’une de nos compétences (propre, à chef de file ou partagée).
Nous participons également à la structuration d’un écosystème visant à accompagner ou financer l’émergence de structures d’ESS ou leur consolidation, et soutenons par ailleurs des dynamiques collectives territoriales de coopération ou de mutualisation entre acteurs sur les territoires girondins. En septembre, nous lancerons un 2e appel à initiatives en faveur de l’innovation sociale et de l’ESS, qui sera axé cette année sous l’angle de l’amélioration de l’accessibilité des services au public.
Pour sécuriser les zones d’ombres de la loi Notre, nous avons saisi l’opportunité qu’offre l’article 7 de la loi relative à l’ESS du 31 juillet 2014, en élaborant avec la région Nouvelle-Aquitaine une convention de partenariat en faveur de l’ESS en Gironde. Celle-ci vise d’une part à articuler nos interventions respectives, et d’autre part à les sécuriser juridiquement.
Source : L’ESS, dans les zones grises de la loi Notre un article signé Antoine Détourné publié le 31/08/18 par le site LA LETTRE DU CADRE TERRITORIAL